
Nadine Neema s’est lancée pour la première fois dans l’écriture d’un roman jeunesse.
(Courtoisie Nadine Neema)
Musicienne, compositrice, et aujourd’hui écrivaine, la Montréalaise Nadine Neema a consacré ces dernières années à la rédaction d’un roman jeunesse, puisée dans ses expériences passées au cœur de Wekweètì.
Jules, une jeune fille de onze ans, adoptée par la communauté de Wekweètì, se voit entrainée dans une expérience hors du commun. Un périple en canot bercé de traditions et de rencontres, dont la finalité est de célébrer un moment marquant de l’histoire : la date d’entrée en vigueur de l’Accord Tli?cho, en aout 2005.
À travers Journal of a Travelling Girl (Journal d’une jeune voyageuse), Nadine Neema dresse le portrait de personnes qu’elle a rencontrées, de jeunes ou de plus vieux, mais également d’elle-même.
Connue avant tout à travers le Canada pour ses compositions musicales, et, parmi d’autres, sa collaboration avec Leonard Cohen, l’autrice montréalaise a également travaillé au sein de la collectivité de Wekweèti à partir de 1999, en tant qu’administratrice.
« Pendant que j’étais là-bas, vers la fin de mon séjour [en 2001], j’ai acheté une caméra vidéo, et j’avais posé plein de questions sur la communauté », se remémore-t-elle.
Devant l’objectif, les langues se délient, et les souvenirs des années 1960 — la collectivité est née en 1962 — ressurgissent. « Les ainés qui étaient là, qui sont partis aujourd’hui, sont ceux qui ont construit la communauté, raconte-t-elle. Je voulais vraiment enregistrer leurs histoires avant qu’il ne soit trop tard. »
Ces enregistrements, remis à la communauté, dorment un certain temps dans les tiroirs, avant de ressurgir quelques années plus tard.
Voyage
En 2012, puis en 2013, Nadine Neema est invitée à participer au voyage annuel en canot, à l’image de son héroïne, avec les membres de la communauté de Wekweètì.
« C’est ce voyage de 2013, de Wekweètì à Behchoko`, qui est devenu la ligne directrice de l’histoire du livre, détaille l’autrice. La plupart des gens de ma communauté avec qui j’ai vécu pendant trois ans étaient de ce voyage. »
Au contact des jeunes, durant une dizaine de jours, elle s’imprègne de l’atmosphère, capte les attitudes et les réactions lors des longues soirées autour des feux de camp. « J’ai vraiment observé ces jeunes qui faisaient ce voyage pour la première fois, se souvient Nadine Neema. C’est eux qui ont inspiré cette histoire et leurs interactions avec les ainés. »
Les paroles et les anecdotes des anciens, qui donnent au Journal of A Travelling Girl son authenticité, sont tirées des enregistrements de 2001. « Dans le livre, il y a les grands-parents de [l’héroïne] qui racontent beaucoup d’histoires, sur la vie d’autrefois, c’est ça que j’avais enregistré. »
C’est John B. Zoe, l’ancien négociateur en chef des revendications territoriales de 1994 jusqu’à la mise en place du gouvernement en 2005, qui la pouss à écrire ce livre. « Il m’a mis en tête d’écrire une histoire pour que les jeunes apprennent ce moment important de leur histoire », explique-t-elle.
Héritage
Pour l’ancien chef, aujourd’hui conseiller pour le gouvernement tli?cho, l’utilité de cet ouvrage est de donner un héritage aux plus jeunes.
« Les connexions avec les parents ou avec les gens plus âgés sont réduites, et la transmission est beaucoup plus difficile, soutient-il. De nos jours, une large portion de la communauté, dont les enfants, est déconnectée de leur langue, la langue de la Terre, et deleurs connaissances. »
Pour revenir à leurs racines, il faut que « ce genre d’outil soit développé », soutient John B. Zoe, avant d’ajouter que le livre sera distribué au plus grand nombre.
La publication est pour le moment seulement en anglais, mais Nadine Neema espère que le livre pourra être traduit avant l’été prochain. « La première chose que l’on veut faire, c’est le traduire en tli?cho, même si peu de gens lisent [cette langue], et on a aussi pensé à faire un livre audio, détaille Nadine Neema. J’aimerais aussi le traduire en français parce que c’est un livre qui pourrait vraiment être utilisé, il raconte une histoire importante du Canada, de nos premières nations. »
Pour John B. Zoe, c’est une évidence : « Nous devons le rendre plus accessible dans notre langue. »
Le lancement officiel du livre, qui aurait dû se dérouler en personne avec l’autrice à la librairie Book Cellar de Yellowknife, aura finalement lieu en ligne. Soit, le mardi 24 novembre à 19 heures, heure des Rocheuses. Plus d’informations sur la page Facebook de l’évènement.